jeudi 26 janvier 2017

Mercredi 18 janvier : restitution — le grand jour !

Journée électrique. 
Sprint éclectique.
Fin abrupte…!

Le matin à 8h l’équipe de « Zone Rouge » (Taigue, Mathieu, Geneviève, Ngarta) est dans le camp afin de mener sa seule répétition dans l’espace. 

De 9h30 à 12h30, Geneviève et Mathieu font les dernières répétitions de chant et de théâtre en vue de la restitution. 

12h30-13h30 - Diner

De 13h30 à 15h, réunion avec le groupe Ndam se na Gondjé afin de parler d’organisation, de définir les postes clés, de mener des élections (présidence, secrétaire, trésorière, chef chorégraphe, chef théâtre, etc.). Plusieurs tensions intestines font surface… à voir comment cela va se poursuivre. En même temps, il y a de belles forces positives et humbles dans le groupe, qui ont le potentiel de propulser les autres. 

À 15h30 le public n’est pas au rendez-vous… les gens arrivent une heure plus tard ! 

16h30 : on présente « Zone Rouge » devant un public réceptif, captivé, réactif. Ils sont au moins 350.

16h55 : restitution du chant, du théâtre et de la danse. Les petits nez rouges pointent dans mille directions et brillent comme autant d’étoiles, je suis fier des participant.e.s, et touché par ce moment magique que nous vivons tous ensembles.

Photo-express

17h20 : on reçoit un appel de l’UNHCR… les voitures qui nous transportent doivent quitter le camp à 17h30 au plus tard. Si on n’embarque pas, ils s’en vont sans nous ! 

17h25 : on arrête le spectacle avant la présentation de la dernière danse… on ramasse nos trucs en vitesse, on prend les dernières photos de groupe dans le chaos du départ. On sert 10 mains par seconde, on saute dans la voiture devant une centaine de gens qui nous saluent, qui ne veulent pas qu’on parte, les bras en l’air et le désespoir au visage. 

17h29 : La porte se referme, la voiture quitte, et une pléthore d’enfants et d’adultes courent derrière la voiture tristes et reconnaissants… criant nos noms, se jetant par terre.





Pas de fin. Pas de retour. Pas de conclusion. 
Ça, c’est difficile. 
« C’est normal », nous dit Taigue, « C’est toujours comme ça…!»


Départ...

Impressions

  • une grande reconnaissance
  • une fatigue physique et émotive qui fait surface… le soir on mouche et on tousse de la poussière, les muscles sont endoloris, la peau est plaquée, craquée, noircie, couverte de piqûres d’insectes… 
  • l’impression de ne pas avoir pu mettre de point à cette aventure humaine, comme si on a coupé le fil sensible qui nous reliait à ces gens
  • le souvenir des dizaines de petites mains sales d’enfants qui nous accueillent tous les matins et tous les après-midi, qui nous suivent, nous collent, nous regardent étonnés ou souriants…
  • les regards complices avec les participant.e.s
  • les changements drastiques… ceux qui sont arrivés saouls et agressifs mercredi, brusquant les uns, repoussés par les autres, puis qui sont revenus le lendemain sobre, puis le surlendemain encore, appliqués, attentifs, nous disant que nos activités leur font du bien. Ils ont brillé lors de la restitution… ils ont trouvé un sens à tout ça. Est-ce que ça va continuer ?
  • les statistiques : 6 femmes sur 10 sont atteintes du SIDA ; les femmes ont leur premier enfant à 13-14 ans, elles en auront en moyenne 6…
  • les vêtements colorés des femmes, les coiffures-soleil des Centrafricaines, les tatouages des Peuls, la fierté des gens qui prennent part aux ateliers
  • les demandent constantes auxquelles nous faisons face : argent, bouteille d’eau, nourriture, téléphone, « amène-moi au Canada »… j’ai tellement faim. 
  • l’importance que certains donnent à ces ateliers, leur rigueur, leur soucis de bien faire et de voir les autres bien faire, leur concentration dans le travail, leur regard…
  • l’accumulation d’impressions si contrastées, de beauté et de laideur, de respect et de mépris, de résilience et de laisser-aller, de vie et de mort, d’horreur et de sublime, de vérité et de mensonge… tout ça sans jugement, parce qu’on est étranger, parce qu’on absorbe, parce qu’on analysera plus tard… sauf qu’à un moment ça déborde. Pleurer seul, un soir, sans trop savoir pourquoi. Épuisé. 


Dans la danse

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